Fiorina, accoudée à son bureau, regardait la pluie tomber par la fenêtre au siège parisien de Thales en laissant sa tête reposer délicatement dans sa main.
Le cœur lourd mais impatiente de commencer son nouveau travail, elle repensait à ces dernières années qui l’avaient amenée jusqu’ici.
Aujourd’hui était son dernier jour au sein du groupe Thales : la semaine prochaine, Fiorina allait démarrer une nouvelle aventure au sein d’Ornikar, l’auto-école et l’assurance auto nouvelle génération.
Après une expérience réussie chez Malt auprès des fonctions dites “opérationnelles”, Fiorina était déterminée à travailler pour une entreprise similaire (une entreprise de services technologiques).
Seulement, celle-ci ne souhaitait pas se contenter du métier de juriste.
Elle tenait également à réaliser des missions relatives aux “legal operations” (actions et procédés visant à optimiser le fonctionnement de la direction juridique, en coordination avec le reste de l’entreprise).
Cependant l’annonce d’Ornikar pour le poste ne prévoyait pas ce genre de missions initialement.
Cela ne découragea pas notre juriste qui, armée de sa détermination, a su démontrer auprès de la directrice juridique la pertinence d’une telle fonction au sein de son département afin de décrocher le job de ses rêves.
Et même si Fiornia était d’ores et déjà bien intégrée et familière du milieu Legal Ops, notamment grâce à son réseau grandissant, il s’agissait d’une première expérience et elle appréhendait un peu sa prise de poste !
Le lundi matin suivant, Fiorina découvrit une entreprise jeune, bienveillante, mais également performante et, inexorablement, exigeante.
“On a une croissance et un rythme que l’on souhaite conserver”, lui expliqua le directeur général de l’époque à son arrivée.
“Pour commencer si tu le veux bien, on pourrait réaliser un benchmark des solutions CLM (solutions de gestion des contrats), et effectuer un état des lieux du Knowledge Management (gestion de la connaissance). On a déjà Hyperlex en place, mais l’outil n’est pas utilisé parce qu’on doit tout apprendre à l’IA nous-même, et j’aimerais changer. Qu’est-ce que tu en penses ?”
“Absolument, bonne idée ! Tu peux compter sur moi et sur l’équipe juridique” répondit-elle.
La pression était à son comble : Fiorina, en période d’essai, se retrouvait face à deux missions capitales pour le département juridique et le reste de l’entreprise.
De plus, en termes de gestion de la connaissance, tout était à refaire ! Il fallait faire un état des lieux de la situation actuelle et recenser où étaient stockées telles ou telles informations, tel ou tel document.
Il s’agissait d’un travail intellectuel stimulant, avec des nouveaux challenges que Fiorina n’avait jamais rencontré auparavant.
Notre legal ops débutante était motivée comme jamais.
Passionnée par son travail, fière de la façon dont la mission se déroulait et prenant un véritable plaisir à réaliser son étude de marché, elle avançait vite et était persuadée qu’elle allait pouvoir implémenter une solution CLM rapidement, en quelques mois.
Mais les choses se sont vite compliquées…
Chaque trimestre, des objectifs “opérationnels” étaient fixés. Et chaque trimestre, ces objectifs n’étaient pas remplis car ils finissaient par être dépriorisés…
Fiorina avait toujours une urgence plus importante à traiter.
Surtout, petit à petit, les missions purement juridiques prenaient le pas et empiétaient sur les missions “legal ops”, pour son plus grand regret.
Elle n’avait plus le temps pour réaliser ses missions “ops”, mais une fois sur ses missions juridiques, les actions (et outils) entamées sur le plan opérationnel (mais non achevées) lui manquaient cruellement.
Son travail était devenu une source de stress constant.
Le simple fait de savoir qu’elle n’atteindrait pas ses objectifs la rendait profondément déçue.
Ce sentiment était d’autant plus difficile à gérer pour Fiorina, car elle avait l’impression de ne pas vraiment travailler sur les missions pour lesquelles elle s’était engagée, mais plutôt de se consacrer principalement aux tâches juridiques.
Cela devint rapidement frustrant.
Ce mélange de responsabilité et de sentiment d’être empêchée dans son travail créait en elle une impression de syndrome de l’imposteur. Elle se sentait à la fois responsable de ses échecs et frustrée de ne pas être soutenue par les moyens nécessaires pour réussir.
Puis vint le coup de grâce : un changement d’avis au sein du comité de direction, qui considéra qu’un outil de gestion des contrats était finalement un luxe, une dépense inutile, et qu’une gestion dans un fichier Excel était amplement suffisante…
Ce changement brutal de cap fut particulièrement décourageant pour Fiorina qui s’était tellement investie jusqu’à maintenant.
Heureusement, la direction a revu sa position et aujourd’hui, même si l’outil choisi n’est utilisé que par le service juridique, Fiorina compte bien démocratiser son utilisation à toute l’entreprise !
Afin de ne plus revivre la même expérience douloureuse, Fiorina décida de construire une feuille de route “Legal Ops” pour guider leurs projets.
Mais la réalisation de cette roadmap elle-même devint rapidement un objectif opérationnel qui était sans cesse repoussé.
Les priorités changeaient constamment, et le projet de la roadmap était souvent mis de côté, comme s’il était maudit !
Un jour, à la fin de l’année 2022, Fiorina participa à une formation spéciale appelée « Legal Ops Academy » dirigée par nulle autre que la fameuse société Calame : The Legal Ops Company.
Lors de cette formation, une séance fut consacrée à la construction de la stratégie et à l’élaboration de la roadmap des opérations juridiques.
Pour Fiorina, c’était un signe du destin. Elle savait qu’elle devait se concentrer sur ce sujet et mettre en place la roadmap pour l’année 2023.
Elle se lança dans le processus en trois étapes.
Tout d’abord, elle organisa un atelier dynamique avec son équipe juridique. Ils firent un brainstorming pour recueillir toutes les idées incroyables qu’ils souhaitaient réaliser, même celles qui semblaient impossibles. Pendant une heure, ils échangèrent des idées, puis ils prirent une semaine pour réfléchir et ajouter ou modifier des éléments dans leur liste.
Ils travaillaient sous contrainte, fixant une échéance, comme une liste de souhaits pour le Père Noël.
Puis Fiorina classa et ordonna cette liste, en attribuant chaque « souhait » à un domaine spécifique des opérations juridiques, tels que le budget, les ressources humaines, la communication ou le marketing.
Ensuite, dans un deuxième temps, Fiorina utilisa la matrice d’Eisenhower pour classer les 28 souhaits obtenus selon leur importance.
Elle en sélectionna dix en priorité absolue.
Enfin, elle priorisa les tâches au sein de chaque catégorie et les planifia dans le temps en utilisant un diagramme de Gantt.
Cette fois-ci, la priorisation se fit en fonction de l’impact financier et commercial.
Pour chaque souhait, Fiorina décomposa la tâche en sous-tâches intermédiaires afin de pouvoir atteindre l’objectif recherché.
En tant que junior, elle avait parfois du mal à anticiper le temps nécessaire pour chaque tâche.
Malgré cela, elle était heureuse d’avoir progressé.
La roadmap débordait désormais sur l’année 2024, mais cela ne la décourageait pas. Elle avait enfin les idées claires, ses missions définies et ses sous-tâches pour les accomplir. Des dates indicatives avaient même été attribuées.
Si elle devait recommencer à zéro dans un autre poste, elle savait maintenant qu’elle créerait sa roadmap dès le départ !
Fiorina avait compris l’importance de cette “carte magique” pour guider ses pas vers le succès de ses différents projets, juridiques ou non.
Elle avait appris beaucoup tout au long de ce voyage.
Notamment que la construction d’une roadmap nécessitait du temps, de la réflexion et une collaboration étroite avec son équipe.
Elle avait également compris qu’il était essentiel de définir des priorités claires et d’organiser les tâches de manière structurée pour atteindre les objectifs fixés.
Alors que son histoire se poursuit, Fiorina reste déterminée à mettre en œuvre sa roadmap et à faire de ses rêves une réalité.
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